Verba Magica
Les Secrets latins des sortilèges
1ère édition
Expelliarmus, Reparo, Wingardium Leviosa…
En tant que sorcier ou sorcière, nous nous servons presque quotidiennement des sortilèges. À Poudlard, les élèves s’immergent pendant sept années dans l’étude de cette forme de magie.
Mais quel est le lien entre le mot d’un sort et son effet ?
Par exemple, pourquoi un objet vient-il vers nous quand nous prononçons l’incantation Accio ? Pourquoi ne pourrions-nous pas simplement dire Venez ?
Dans cette rubrique, nous nous pencherons sur l’histoire fascinante de la langue des sortilèges, et sur la manière dont leurs origines — souvent latines, parfois gréco-romaines ou même inventées — révèlent leur fonction. Chaque sortilège n’est pas qu’un simple mot magique : il est porteur d’un héritage linguistique.
Spero Patronum, entre magie et antiquité
Commençons par un sortilège bien connue : le fameux Spero Patronum.
En prononçant l’enchantement, un esprit protecteur — le Patronus — apparaît, prenant la forme d’un animal unique à chaque sorcier. L’exécution de ce sortilège est très exigeante : elle nécessite une concentration intense et l’évocation d’un souvenir particulièrement heureux.
La formule Spero Patronum provient intégralement du latin et constitue en effet une petite phrase. Spero est la première personne de l’indicatif présent du verbe sperare, "espérer" ou "attendre".
Ensuite, patronum provient du mot patronus, qui signifie "protecteur". Le mot patronus apparaît ici sous la forme patronum parce qu’il s’agit du complément d’objet direct du verbe sperare. En latin, les mots changent de forme selon leur fonction dans la phrase : c’est ce qu’on appelle les cas grammaticaux.
Spero exige un complément à l’accusatif (le cas du complément d’objet direct), donc patronus (nominatif) devient patronum (accusatif). Ainsi, Spero Patronum signifie littéralement ‘J’attends un protecteur’.
Pendant l’Antiquité romaine, le mot patronus désignait une personne riche qui s’efforçait de prendre un cliens, une personne dans un état plus précaire, sous sa protection.
Tous les matins, le cliens se rendait à la maison de son patronus pour lui témoigner du respect. Les deux parties bénéficiaient de cette relation mutuelle : le cliens recevait une protection matérielle ou juridique, tandis que le patronus était soutenu par le cliens, notamment lors des élections. Un patronus pouvait avoir plusieurs cliens sous sa protection.
Immobilisation et puissance linguistique : Stupéfix
Stupéfix s’emploie pour plonger une personne dans un état semblable à un coma. Un sorcier désirant utiliser ce sortilège doit être très prudent, car une mauvaise utilisation peut avoir de graves conséquences pour la victime, voire entraîner la mort.
L'étymologie renforce bien les effets de cette incantation. Au sein de Stupéfix, on distingue un verbe latin, c’est-à-dire stupere, "demeurer immobile". Le suffixe -fix fait également penser à la forme latine fixus, le participe passé du verbe figere, qui signifie "fixer" ou "figer".
Stupéfix se laisse donc traduire littéralement par « figé dans l'immobilité ». Stupéfix est donc une formule descriptive de l’effet produit sur la personne qui subit le sortilège.
Impero, une question de pouvoir
Malgré sa nature obscure de sort impardonnable, impero, utilisé pour contrôler complètement une personne visée, présente une histoire très fascinante.
La racine imper- se trouve dans plusieurs mots latins : le verbe imperare, "ordonner", "l’adjectif imperialis, "impérial", le nom imperator, "celui qui commande", et imperium, "commandement".
Néanmoins, les mots imperium et imperator, indissociablement liés, revêtent un sens bien plus riche et puissant que ce que laissent penser les traductions.
Dans la Rome antique, imperium indiquait notamment la plus haute puissance, accordée au roi pendant la Royauté romaine, puis, dès l’instauration de la République romaine, à certains magistrats. Cette autorité comprenait non seulement le commandement militaire mais aussi le pouvoir judiciaire et politique sur les citoyens et le territoire. Or, l’acception la plus connue d’imperium se montre sans doute dans l’expression Imperium Romanum, "Empire romaine", c’est-à-dire la partie du monde sous le pouvoir de Rome.
En revanche, le mot imperator était un titre honorifique accordé premièrement pendant la République romaine à un consul romain victorieux. Dès le règne d’Auguste, ce terme devient un des titres officiels de l’empereur romain, incarnant l’autorité suprême à la fois militaire et politique. Ainsi, les racines du sort Impero évoquent l’idée de puissance et de contrôle de l’imperium, mais aussi la lourde responsabilité et les implications morales qu’un tel pouvoir implique.
La langue, aussi magique que les sortilèges
Nous pourrions donc conclure que les cours de Sortilèges et d’Histoire sont bien plus proches l’un à l’autre que l’on ne l’imagine.
Chaque sortilège porte non seulement une force magique indéniable, mais aussi un héritage linguistique et culturel.
Ainsi, la pratique de la magie rappelle à la richesse de notre langue et à la mémoire des civilisations passées.
Prêt à découvrir la racine de nouveaux sortilèges ? Rendez-vous prochainement !
En attendant, laisse-nous un commentaire avec tes envies de sortilèges à décrypter.
Félicie Dubois-Clairmont
L’équipe des prunes des Réseaux Sociaux